L'importance de la formation aux soft skills
Engager ses collaborateurs dans une démarche de formation autour des soft skills peut aboutir à des échecs retentissants si l’entreprise suit la logique d’une formation classique. Frédéric Mischler, facilitateur en transformations et innovations RH, livre à PerformanSe ses convictions nourries d’une riche expérience en la matière.
Est-ce que soft skill et formation sont antinomiques ?
Oui et non. Non parce que les softs skills se développent tout au long de la vie. Elles peuvent requérir l’acquisition d’un certain nombre de fondamentaux en termes de connaissances pour qu’une personne soit en capacité de les travailler. Et oui, parce cela a rapport avec la notion de formation où l'idée de formation serait plutôt classique et professionnelle. C’est-à-dire vouloir former des collaborateurs ou des managers aux soft skills en les installant devant des modules en e-learning ou dans une salle en présentiel et se dire qu’au bout de 7h ils sont aptes aux soft skills. Or, la formation aux compétences comportementales appelle un développement continu dans le temps.
Selon vous, quelle est la bonne démarche de formation ?
La bonne démarche de formation aux soft skills commence par l'individualisation du parcours ou des dispositifs inscrits dans le temps. Dans cette étape, il me semble important de considérer les motivations, les envies et la volonté de chaque collaborateur à s'inscrire dans l'évolution et le développement de ses soft skills. Or, c’est rarement le cas. Pourtant, au-delà du fait qu’il soit motivé à l’idée de travailler sur ses soft skills, il lui faut dépenser une vraie énergie. Et cela ne se fait pas juste comme ça.
Ensuite, elle doit s'intéresser à la prise de conscience de chaque collaborateur sur son niveau en matière de soft skills. La question étant est-ce qu’il a réellement le niveau de conscience que potentiellement il a un besoin de se développer. Pour répondre totalement, il faut que le salarié passe par un certain nombre de freins ou de limites.
Enfin, il s’agit d’organiser un entraînement étalé dans le temps. On pourrait croire qu'on acquiert des softs skills, comme on apprend à utiliser un outil, avec un avant et un après. En fait, si je devais faire un parallèle, pour moi, c'est un peu comme un sportif d'athlétisme de haut niveau. Il n'a pas acquis la capacité de courir le 100 mètres en moins de dix secondes, juste à l’issue d’une ou deux séances de pratique. Or il en est de même pour les compétences émotionnelles, relationnelles ou cognitives. Toutes requièrent de l'entraînement et induisent l'idée de répétition.
Auriez-vous un exemple ?
Oui. C’est en 2008. J'avais suivi une formation qui permettait de développer les rouages de la communication, de l’influence et de leadership. On ne parlait pas encore de soft skills à l'époque. J’avais apprécié le format de cette formation : des séquences hebdomadaires de 3 heures maximum, pendant 12 semaines. Tout en étant dans une dynamique de groupe, chaque individu avait un référent pour suivre individuellement son parcours personnalisé dans la formation. Il y avait donc à la fois de la récurrence et de la répétition, avec des logiques d'intersessions, de mises en application, des exercices afin de sortir de sa zone de confort avec des possibilités d'interagir.
À la fin, j'ai pu acter, qu’à titre personnel, j'avais mis en œuvre des changements grâce à l'ancrage et la mémorisation à force de répétition. Quelques semaines après la formation, le groupe s’est retrouvé dans un restaurant. Et durant nos échanges, j’ai partagé ma prise de conscience autour de l’un des postulats que j'avais apprécié lors de la formation. En face, quasiment 90 % de mes comparses ont été surpris de ce que j'avais retenu, eux l'avaient oublié. Preuve que même avec un format hebdomadaire centré sur des messages clés, avec une idée de répétition sur 12 semaines, l'humain reste ce qu'il est avec sa capacité de mémorisation. La fonction RH doit bien comprendre que les notions de répétition, d'acceptation, d’ancrage dans la durée, prennent du temps. Un temps différent selon chaque individu où l’effet miroir joue un rôle clé.
Comment peut-on préparer un collaborateur qui va suivre une formation ?
Je vois deux aspects dans votre question. D’un côté, il y a une dimension technique de la gestion de formation : cahier des charges, prestations, appels d'offres, etc. Pour un responsable de formation, l’un des objectifs est qu'il y ait un avant et un après la formation afin d’infuser les bonnes pratiques par la suite. C'est-à-dire une capacité à avoir un meilleur retour sur investissement dans les résultats de la formation, tant dans les modalités de réalisation - présentiel, distanciel, blended learning - que les objectifs pédagogiques. D’autant qu’aujourd'hui, la technologie peut être vraiment une aide, sachant que chaque collaborateur n’a pas les mêmes dispositions et habitudes pour apprendre.
D’ailleurs, on peut avoir un très bon ROI et obtenir une très mauvaise évaluation de satisfaction de la part des participants, parce qu’ils ont été chahutés ou trop déstabilisés par rapport à leurs habitudes formatives. Et j’aborde là le deuxième aspect de la préparation : le timing et le contenu pour que les stagiaires soient pleinement réceptifs aux messages passés pendant la formation. Une bonne préparation s’appuie sur une logique de mise à disposition et de répétition de petits contenus : le micro learning adapté. Avec l’aide d'algorithmes, il est aujourd’hui envisageable pour une solution de management de la formation, de se connecter aux agendas des collaborateurs et d’identifier les moments les plus optimums pour leur pousser un message et du contenu. Cette approche permet ainsi de dépasser l’idée de caler tout le monde sur la même fréquence et le même niveau de message. Je trouve cela intéressant d’être en capacité de proposer progressivement des contenus plus adaptés en fonction d’où en sont les personnes individuellement, voire d’y revenir quand cela est nécessaire.
La formation autour de soft skills est ascendante ou descendante dans les entreprises ?
Pour l'instant, j'aurais plutôt tendance à dire que dans la très grosse majorité des cas, l'initiative de se former aux soft skills est plus descendante qu’ascendante. Cela tient à une problématique culturelle française liée à la dimension sociale de la formation. En 2021, les habitudes restent ancrées dans l’esprit de la loi sur la formation professionnelle de 1971, qui portait la responsabilité de formation des collaborateurs sur l'employeur, avec le principe de financement associé. Cependant, même si on ne peut que louer l’approche sociale de financement de la formation, il y a quelque chose qui ne fonctionne plus dans notre mode de pensée. Aujourd’hui, nous sommes tous d'accord pour dire que le principal investissement dans un monde qui change très vite, c'est sur soi et sur ses propres compétences. Ceci devrait être un investissement majeur. Malheureusement, notre premier réflexe français est de dire : « Qui peut me payer la formation ? ». Et en l’absence de financement suffisant, les projets formatifs sont alors bien souvent individuellement remis en cause. Cette culture n’aide pas trop à s’inscrire dans une dynamique autodidacte et de véritablement engagement et d’investissement de soi dans son propre développement. Or quand on veut changer sur le registre émotionnel, comportemental, relationnel ou cognitif, il faut une implication active à différents niveaux, couplée tant à une énergie motivationnelle, qu’à de la persévérance et de l’endurance, parce qu’en fait on travaille sur soi et d’une certaine manière, contre soi.
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